En préambule et pour mettre en condition l’assistance, une petite saynète s’est déroulée dans le chœur de l’église : un personnage attend chez lui la venue d’un invité de marque et pour cela s’est plié en quatre pour l’honorer à sa table. Successivement, il a ouvert sa porte et offert l’hospitalité et un peu de chaleur à des enfants, puis à une dame âgée et un mendiant et ils sont repartis. Celui qu’il attendait ne venait pas. En désespoir de cause, il s’est endormi et vers minuit dans un halo de lumière, il fut réveillé par une voix qu’il perçut comme celle de son invité. « Je t’ai attendu toute la soirée et tu n’es pas venu » lui reprocha-t-il. Ce à quoi la voix lui répondit : Détrompes-toi, je suis entré à trois reprises dans ta maison et tu ne m’as pas reconnu. Les enfants, c’était moi. La femme âgée, c’était moi. Le mendiant, c’était moi.
Dieu s’est révélé aux hommes dans un petit-être né dans une étable. Un évènement inouï, impensable et pourtant bien réel. C’est ce à quoi l’abbé Emmanuel Canart s’est attaché à démontrer dans son homélie en référence à Saint Ignace lequel donnait des conseils pour prier avec un texte d’Evangile. Il conseillait d’imaginer la scène, de ressentir les odeurs, d’écouter les bruits, d’être sensible à la lumière, d’imaginer les regards, les attitudes, les gestes. Il recommandait même de s’imaginer soi-même dans la peau d’un personnage, d’éprouver ce qu’il ressent. Aussi pendant quelques instants, l’abbé Emmanuel Canart a invité chacun à s’imaginer dans la peau d’un personnage de l’Evangile que nous venions d’entendre sur la naissance de Jésus, Evangile mimé par des enfants.
Certains ont pu s’imaginer en bergers ! Ils se sont reconnus dans ces hommes qui n’ont pas mis longtemps à accourir à la crèche. Ils ne s’embarrassent pas de questions. Ils entendent l’annonce de l’ange puis le chant de tous les anges ; tout de suite ils sont là. Ils ont cru le message de l’ange. Ils sont présents. Immédiatement. On leur parle d’une Bonne Nouvelle, ils l’accueillent ! Merci de nous redire qu’il est possible de faire confiance en Dieu et dans les autres !
D’autres se sont peut-être imaginés dans la peau d’autres bergers dont le récit ne parle pas. Des bergers qui ont entendu eux aussi l’annonce de l’ange mais qui, peut-être, ne se sont pas déplacés jusqu’à la crèche. Pourquoi ? Par fatigue peut-être ! Ou par peur d ‘être déçus … Peut-être que finalement, ils sont quand même venus à la crèche mais en retard, méfiants… Approchons-nous de la crèche ce soir et laissons le Seigneur nous parler.
D’autres encore ont pu s’imaginer dans la peau de l’aubergiste. Celui qui a dit au jeune couple qu’il n’y avait plus de place … Peut-être a-t-il regardé, en écartant discrètement le rideau, la jeune femme enceinte et son mari s’éloigner dans la nuit ! Peut-être a-t-il été envahi de gêne ou de culpabilité ! De la crèche, une voix murmure à son cœur qu’il n’est jamais trop tard ! Que tout peut repartir en cette douce nuit.
Il fallait faire preuve d’audace pour se mettre à la place de Marie et Joseph. Des enfants l’ont fait en mimant l’Evangile. Marie et Joseph dépassés par l’évènement mais sereinement dépassés. Conscients qu’ils vivent un évènement inouï … dans la plus grande discrétion ! Sûrs de ne rien mériter mais si heureux d’y être associés. Même si bien des évènements surgissent dans notre vie et nous dépassent, comme Marie et Joseph soyons apaisés de toutes angoisses et craintes de l’avenir.
Dans cette histoire l’âne et le bœuf n’ont pas démérité. Humblement, ils ont fait ce qu’ils pouvaient en réchauffant Jésus. Et ce n’est pas rien. Heureux ceux qui réchauffent la vie de Jésus aujourd’hui en faisant sa joie.
Et il y a les mages ! Ils ne sont pas là encore car ils sont sur le chemin ! Ce sont des savants, des personnes intelligentes. Ils se posent bien des questions… mais cela ne les empêche pas de se mettre en route, de chercher celui qui est la paix, de demander humblement de l’aide. Ils se laissent guider par la Lumière. Faisons taire tous nos raisonnements quelques instants ? Oublions tout ce que nous croyons savoir de Noël. Contemplons !
Les mages sont arrivés et ont déposé leurs présents aux pieds de l’enfant. Et, comme eux, repartons par un autre chemin. Ne rentrons pas chez nous comme avant.
Roger Roussel