Homélie Dimanche autrement 1° Dimanche de Carême
Un vicaire parisien a écrit à son archevêque ceci : « Pour un homme qui, se posant en dehors des préjugés et des intérêts, examine ce qui se fait avec son esprit et son cœur, il est de toute évidence que si nous continuons longtemps encore à traiter les choses de Dieu comme nous le faisons, la Religion est perdue à Paris et dans les diocèses environnant ».
La suite de la lettre n’est pas plus gaie. Il évoque les parrains et marraines « qui songent à s’informer de leurs moeurs et de leur foi, même de leur instruction ? S’informe-t-on seulement s’ils savent les prières essentielles qu’ils devront enseigner à l’enfant ?
Pas plus réjouissante non plus quand il parle du KT et de la première communion « alors, des parents qui ne croient à rien, car ils ne savent rien, se souviennent que jadis leur enfant fût apporté au saint baptême…. Ils l’envoient donc au catéchisme… « les enfants ont pleuré car on leur a dit que c’était le plus beau jour de leur vie… La comédie est jouée… Aussi les Pâques suivantes se passeront sans que ces enfants songent à vous donner beaucoup de peine »… J’évite le passage sur la confirmation puis sur le mariage qui sont du même tonneau …
En fait, cette lettre a été écrite en 1849 !!!!! De quoi relativiser nos problèmes actuels !!!!!
Bien-sûr, il nous faut regarder la réalité, avec courage, sans se voilier la face.
Au cours de la messe ouvrant, le lundi 6 septembre, les visites ad limina des évêques du sud de la France à Rome, Mgr Robert Le Gall, archevêque de Toulouse, disait : « Nous n’intéressons pas beaucoup nos contemporains », a poursuivi l’archevêque, qui entame à Rome sa troisième visite ad limina. « Nous avons pêché toute la nuit sans rien prendre. C’est notre sentiment, c’est notre constatation amère, souvent » a-t-il ajouté.
Mais il poursuit !
Pour autant, ce sentiment d’amertume, cette tentation du découragement, ne doit jamais l’emporter, a exhorté le prédicateur. « Chaque jour, la parole de Dieu nous réveille et nous jetons à nouveau nos filets (…) Oui, dans nos diocèses, nous voulons continuer à jeter nos filets et à clamer que le Christ est l’espérance de la gloire. »
J’aimerais aujourd’hui nous mettre en garde contre une nostalgie du passé ! Du temps où nos églises étaient davantage remplies et l’Eglise davantage respectée (apparemment en tous cas) …
Il y a une forme de nostalgie qui est surtout le désir du retour :
d’une Eglise puissante qu’à une Eglise qui parle bien de Jésus,
d’une Eglise dominatrice qu’à une Eglise Servante,
d’Eglise vivant pour elle-même qu’à une Eglise existante pour les autres.
Quand j’étais jeune, il y avait 6 prêtres dans mon collège…. Bien peu d’élèves de ma classe sont pratiquants ou même croyants aujourd’hui !
Je suis marqué de ce que le début de l’Eglise soit sur un âne, en fuite vers l’Egypte. Cet âne (ou son cousin) qu’on retrouvera aux Rameaux. Murmure dans mon cœur ce verset du psaume 32 : « Le salut d'un roi n'est pas dans son armée, ni la victoire d'un guerrier, dans sa force. Illusion que des chevaux pour la victoire : une armée ne donne pas le salut. Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour ».
Les chrétiens aujourd’hui ne sont pas sur des chevaux ni à la tête d’une armée. Mais fuyons l’illusion que des chevaux donnent la victoire. Avançons sur des ânes, comme notre Maître.
Je pense à cette prière du Magnificat que nous récitons si souvent, et chaque soir à l’office des Vêpres. Avec Marie, nous exultons :
« Mon âme exalte le Seigneur, Et mon esprit se réjouit en Dieu, mon Sauveur,
il a dispersé ceux qui avaient dans le cœur des pensées orgueilleuses.
il a renversé les puissants de leurs trônes, et il a élevé les humbles.
il a rassasié de biens les affamés, et il a renvoyé les riches à vide ».
Et si Dieu nous avait pris au sérieux ? Et s’il avait exaucé notre prière ? Quand nous chantons le Seigneur avec Marie dans le Magnificat, c’est pour le remercier d’avoir renversé ceux qui se pensaient puissants, ceux qui souffraient d’orgueil ou avaient les mains pleines.
Pourquoi nous plaindre aujourd’hui de vivre cette situation ? Le risque serait celui de la nostalgie, de l’amertume, de la tristesse. Le pape François (Angelus 29 aout 2021) écrit : « Se plaindre empoisonne, cela vous conduit à la colère, au ressentiment et à la tristesse, celle du cœur, qui ferme la porte à Dieu".
Plutôt qu’être dans la plainte ou la nostalgie, ce dimanche nous invite à deux attitudes :
- Marcher ensemble !
- Vivre les passages que nous aurons à franchir dans notre vie et dans l’Eglise dans la confiance !
Oui, Marcher ensemble !
Avant d’être d’un clocher, d’un mouvement, d’un service, nous sommes de Jésus. Il est notre pays !
Avant d’être d’une tendance politique ou d’une sensibilité, nous sommes de Jésus ! Il est notre identité !
Avant de d’être d’une catégorie d’âge ou de santé, nous sommes de Jésus. Il est notre joie !
Oui, marcher ensemble dans la confiance ! les uns envers les autres et confiance en Dieu !
Cette confiance sans laquelle l’amertume et la tristesse nous rongent !
Cette confiance qui rend le cœur plus léger !
Marchons ensemble dans la confiance !